En 2015, un conflit civil éclate au Yémen. Ce n’est pas la première fois que ce pays est en proie à l’instabilité politique, mais cette fois-ci, le conflit n’a rien de temporaire et se transforme en véritable guerre qui embrase tout le territoire. Six ans après, la situation peut être qualifiée de désastreuse : le Yémen est officiellement devenu la plus grande crise humanitaire au monde.
Pour de nombreuses personnes comme Nabiha, 38 ans, la guerre a complètement changé sa vie. Son mari est décédé à la suite d’une explosion sur son lieu de travail, la laissant ainsi seule avec ses trois enfants. A partir de là, le cauchemar ne fait qu’empirer constamment, la famille déjà traumatisée par la perte de leur proche doit fuir d’un emplacement à l’autre, s’adaptant au mouvement des lignes de fronts.
« Je vivais très près des combats. J’ai dû déménager dans un autre quartier parce que des familles étaient tuées et blessées tout autour de nous. Nous avons déménagé trois fois d’un quartier à l’autre pour éviter les balles et les frappes aériennes, »
déclare-t-elle. Plus de trois-quarts des personnes déplacées au Yémen sont des femmes et des enfants ; une situation d’autant plus critique dans un pays à forte tradition patriarcale comme celui-ci, où il est difficile pour une femme de trouver un travail pour subvenir aux besoins de sa famille, les rendant encore plus vulnérables.
Les inquiétudes du quotidien dues au conflit, la recherche de nourriture en tête, gardent une place importante dans l’esprit de Nabiha. Mais elle pense également au futur de ses enfants :
« Ma fille veut devenir pharmacienne... L’un de mes garçons se verrait bien médecin et le second veut travailler dans les médias. Ils sont d’excellents élèves »
affirme-elle. Malheureusement l’argent est insuffisant pour payer des études ou du matériel scolaire, le peu de ressources qu’elle possède est immédiatement consacré à la nourriture et au logement.
Comme Nabiha, des millions de personnes se retrouvent privés de sources de revenus et vivent dans une instabilité permanente dont les effets se font ressentir à chaque instant. Plus de 20 millions de personnes au Yémen dépendent de l’aide humanitaire pour survivre. 12 millions d’entre eux se trouvent dans une situation critique, dont 5 millions au bord de la famine. Le pays est en ruines, et plus de deux tiers de sa population ne peut plus subvenir à ses besoins vitaux.
La moitié des hôpitaux et installations sanitaires du pays ont été détruites. La population civile se trouve donc maintenant incapable d’accéder aux soins de santés les plus élémentaires, et ce alors que la situation sanitaire se dégrade partout. Le pays a d’ailleurs connu récemment la pire épidémie de choléra que le monde ait vécue depuis longtemps, et doit faire face aujourd’hui, comme toute la planète, à la COVID-19.
L’impasse désastreuse dans laquelle se trouve la population yéménite ne semble pas se débloquer. Pour plus de 4 millions de déplacés internes, l’espoir de retourner chez soi et de retrouver une certaine stabilité semble lointain.
La situation sécuritaire au Yémen est très instable, les lignes de front se déplaçant incessamment. A tous les problèmes du quotidien auxquels font face les Yéménites se rajoute donc l’incertitude de devoir à tout moment être prêt à fuir à nouveau. Chaque jour, la vie au Yémen devient plus dangereuse et désespérée. Le HCR et ses partenaires sur place sont aussi amenés à chercher sans cesses de nouvelles routes d’accès, de nouvelles solutions pour apporter de l’aide aux civils dans une situation risquée et en constant mouvement.
Le HCR travaille sans relâche à fournir une aide humanitaire vitale à la population du Yémen. Au total, plus de 50 millions de CHF d’aide financière ont été distribués l’année passée pour soutenir les Yéménites sans revenu, sans foyer, et sans perspectives. La mise en place de camps, et d’autres infrastructures provisoires pour accueillir les personnes forcées de fuir font également partie des priorités.
Malgré l’état désastreux de cette crise, devenu aujourd’hui le plus grand défi humanitaire du siècle, la réponse du HCR pour le Yémen est fortement sous-financée. Seuls 22% des 271 millions de CHF requis pour apporter une aide à toutes les personnes dans le besoin au Yémen en 2021 ont été levés. Il est de notre responsabilité à tous de faire tout notre possible pour que la crise au Yémen ne tombe pas dans l’oubli, et que la communauté internationale continue à soutenir une population civile au bord du gouffre depuis trop longtemps.