Depuis quelques années, la transformation digitale, la technologie et l’innovation ont progressivement impacté de nombreux secteurs et industries, s’invitant dans les stratégies de nombreuses organisations, entreprises privées ou institutions académiques. Le monde humanitaire, tant du côté des organisations Internationales que des organisations non gouvernementales, n'est pas étranger à ce mouvement de fond. La pandémie de Covid-19 a même accéléré cette dynamique, montrant à quel point innovation et créativité peuvent être de formidable leviers et de précieuses ressources pour faire face à certains problèmes ou rendre plus efficace toute intervention humanitaire.
Quand l'innovation se met au service de l'humanitaire, c’est ce thème qui va être abordé dans cet article.
Si la pandémie fut, comme nous le verrons plus loin, un accélérateur - presque imposé - d'innovation pour le monde humanitaire, des approches nouvelles et créatives sont mises en place par les OI et ONG depuis quelques années déjà.
En 2018, le HCR lance le Prix d’Innovation pour les ONG qui récompense les efforts et les réalisations des ONG qui ont développé des approches innovantes pour la protection et la fourniture de services aux réfugiés et autres personnes relevant de la compétence du HCR. Des initiatives au profit de ces populations vulnérables, mais aussi des autres organisations sur le terrain. Des élans favorables à l'ensemble de l'écosystème humanitaire, qui viennent en soutien, complètent des process existants longuement éprouvés.
Cette année, le Prix a souhaité mettre en lumière les organisations dirigées par des femmes et les organisations dirigées par des filles (WLO) travaillant avec ou soutenant les réfugiés, les personnes déplacées à l'intérieur du pays, les rapatriés, les apatrides et les communautés d'accueil. En tout, ce sont sept lauréates qui ont été récompensées.
Lorsque tout semble à l'arrêt, mais que les crises demeurent et que les populations affectées ont plus que jamais besoin d'aide, comment faire ? C'est précisément ce qui s'est passé en mars 2020, alors que le lockdown lié à la pandémie de Covid-19 commençait à être mis en place un peu partout dans le monde.
La pandémie a très rapidement montré les signes d'un impact négatif sur la protection et le bien-être des personnes concernées dans le monde entier. Perte de l'accès à l'asile, perte de liberté de mouvement et des moyens de subsistance, insécurité alimentaire accrue, sans oublier un risque plus grand de violence sexuelle et sexiste du fait de l'isolement des personnes vulnérables. Les réfugiés et autres personnes relevant de la compétence du HCR font partie de ces personnes parmi les plus vulnérables touchées par la pandémie.
Pour continuer à assurer leur protection et celles de tous les groupes de personnes nécessitant une aide humanitaire, il a alors fallu s'adapter. Et vite.
Leslie Méndez, assistante principale du HCR chargée des moyens de subsistance, attribue un vélo électrique à Rosa (à droite), une réfugiée vénézuélienne de 46 ans à Quito, pour qu'elle l'utilise comme livreuse. Rosa est arrivée en Équateur en 2016 avec ses deux enfants. Avant la pandémie de COVID-19, elle cuisait des biscuits et les vendait aux boulangeries locales. Cependant, les mesures de quarantaine l'ont empêchée de continuer et son divorce avec son mari a aggravé ses difficultés financières.
Le Covid-19 fut un accélérateur pour la créativité et l'innovation. Rapidement, ces deux segments ont commencé à prendre une place importante dans les réponses apportées par le monde humanitaires.
De nombreuses organisations de réfugiés, travaillant avec les personnes concernées et les communautés d'accueil, ont ainsi mis en place des pratiques innovantes par exemple :
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en réorganisant les activités de subsistance existantes pour produire des équipements de protection individuelle
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en organisant des débats radiophoniques pour diffuser des informations correctes sur la pandémie parmi les réfugiés
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en produisant des savons à base de plantes à distribuer
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en utilisant des consultations médicales/psychosociales via des outils de messagerie accessibles.
Les réfugiés syriens, Youssef (à gauche) et Ahmed, s'arrêtent sur leur vélo devant le laboratoire d'innovation du camp de Zaatari en Jordanie. Ils se sont rencontrés dans le camp après avoir fui le conflit et ont depuis développé de nombreuses innovations pour aider la vie des réfugiés.
Dans le contexte du Covid-19 les acteurs humanitaires ont su adapter leurs opérations habituelles pour répondre aux besoins émergents résultant de COVID-19. Ils l'ont fait en créant de nouveaux services ou en s'appuyant sur leurs programmes existants et leurs points forts pour orienter leurs réponses innovantes.
D'autres organisations ont été créées précisément pour faire face à la pandémie de COVID-19 et se sont appuyées sur les communautés d'accueil et de réfugiés pour soutenir leur réponse. Collaborer, s'entraider, s'inspirer de ce que font les autres, tel fut le moyen d'avancer ensemble et de poursuivre les missions.
Au sein de ces pratiques nouvelles, certaines subsisteront, tandis que d'autres s'effaceront au fur et à mesure que la pandémie s'éloigne.
Mais une chose est sûre : le monde humanitaire aura appris, durablement, à composer avec l'innovation.